ARNAUD MONTEBOURG

« Il reste un million et demi de personnes sans mutuelle en France »

 

Interrogé sur le thème de la santé, Arnaud Montebourg a souligné qu’ « il reste près d’un million et demi de personnes sans mutuelle » en France. Si certaines études soulignent le nombre de Français sans complémentaire santé, aucune ne précise le chiffre de « sans-mutuelle ». Une estimation permet toutefois d’arriver à un chiffre approchant celui donné par le candidat à la primaire de la gauche.

 

LE CONTEXTE

Invité de France Inter le 4 décembre 2016 dans l’émission Questions politiques, Arnaud Montebourg a évoqué le thème de la santé. Après avoir cité le chiffre d’un million et demi de Français ne possédant pas de mutuelle, il a précisé que les membres de certaines catégories socio-professionnelles sont « au-dessus [en terme de revenus, ndlr] de la CMU (couverture maladie universelle) mais n’ont pas les moyens de s’offrir une mutuelle ».

 

L’explication

Une série d’enquêtes sur la santé et la protection sociale (ESPS) permet d’avoir accès aux chiffres concernant la sécurité sociale en France. La dernière à été publiée en 2012, la prochaine le sera en janvier 2017. L’enquête de 2012, menée par l’Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes), explique qu’« en 2012, (…) le taux de personnes non couvertes par une complémentaire santé [qui regroupe les mutuelles, les assurances privées et les institutions de prévoyance, ndlr] se stabilise à 5%. »

Pour déterminer à combien de Français correspondent ces 5%, il faut procéder à un calcul de pourcentage en fonction du nombre d’habitants. L’étude précise que seules les personnes âgées de 15 ans et plus sont concernées. Selon le bilan démographique de l’Insee, cette catégorie d’âge représentait 52,7 millions de Français en 2015.

Cette même année, un peu plus de 2,6 millions de Français de plus de 15 ans ne possédaient pas de complémentaire santé, d’après un calcul se fondant sur l’ESPS de 2012 et sur un rapport de la Dress publié en 2015. Soit 1,1 million de plus que le chiffre sur les mutuelles avancé par Arnaud Montebourg.

Mais le secteur des complémentaires santé regroupe différents types de couverture. D’après le code de la mutualité, les mutuelles « mènent au moyen de cotisations versées par leurs membres (…) une action de prévoyance, de solidarité et d’entraide (…) afin de contribuer au développement culturel, moral, intellectuel et physique de leurs membres et à l’amélioration de leurs conditions de vie. » A ces mutuelles s’ajoutent les assurances privées (en échange de cotisation, elles offrent à un individu une assurance qui couvre les risques liés à la maladie, aux accidents du travail, à l’invalidité, à la maternité et au décès) et les institutions de prévoyance (qui proposent aussi des assurances visant à couvrir les risques de la vie).

Selon un rapport de la Dress publié en 2015, le marché de la complémentaire santé est dominé par les mutuelles (54% de parts).

En suivant cette répartition, et en partant du principe, faute de meilleures données disponibles, que les personnes sans complémentaire santé se répartissent de la même façon, on arrive à une estimation d’environ 1,4 millions de Français de plus de 15 ans sans mutuelle. Auquel cas Arnaud Montebourg voit juste, bien qu’arrondissant ce chiffre à 1,5 million.

Des “sans-mutuelle” par manque de moyens financiers

Si l’ancien ministre de l’Economie précise que ces « sans-mutuelle » sont présents dans toutes les catégories socio-professionnelles, l’étude de l’Irdes souligne elle que « l’absence de complémentaire santé concerne d’abord les populations les plus précaires », notamment les chômeurs (14%) et le premier quintile de revenu (11%). « Le premier motif de non-recours à la complémentaire santé reste le manque de moyens financiers ou le coût trop élevé des contrats chez 53 % des personnes non couvertes », précise l’étude.

Arnaud Montebourg a également raison lorsqu’il explique que certaines personnes ont un salaire trop élevé pour bénéficier de la CMU (couverture maladie universelle) mais n’ont pas les moyens de s’offrir une mutuelle. Le plafond mensuel de revenus à ne pas dépasser pour avoir accès à la CMU s’élève à 721€ pour une personne seule, soit bien en dessous du seuil de pauvreté français (1008€ en 2014 selon l’Insee). Certains ménages ne peuvent pas se permettre de payer une mutuelle. Selon l’enquête Le coût des mutuelles en France, menée par l’agence Oxygen, plus l’on vieillit et plus la mutuelle coûte cher, comme le montre le graphique ci-dessous.

 

Jeanne Laudren