ARNAUD MONTEBOURG

« Les Italiens, les Français et les Allemands
ne veulent plus de l’Union Européenne »

Lors d’une conférence à Sciences Po Lille, Arnaud Montebourg s’est appuyé sur l’exemple de l’Italie, de la France et de l’Allemagne, pour expliquer que les peuples ne veulent plus de l’Union Européenne (UE). Il s’est manifestement trompé d’exemple. En effet, si ces peuples ne sont pas toujours d’accord avec les institutions et le fonctionnement même de l’UE, les enquêtes d’opinion montrent qu’ils ne souhaitent pas pour autant en sortir. 

 

LE CONTEXTE

Arnaud Montebourg, candidat à la primaire de la gauche, a donné une conférence à Sciences Po Lille le 15 novembre. Lors de son intervention face aux étudiants, il est revenu sur la place de l’Union Européenne aujourd’hui. En réponse à une question, il a déclaré : « L’Union Européenne risque de disparaître dans les années à venir. Pourquoi ? Parce que les peuples n’en veulent plus. Les Italiens n’en veulent plus, les Français n’en veulent pas, même les Allemands qui en ont profité n’en veulent plus. »

 

L’explication

Les propos qu’a tenu Arnaud Montebourg à propos de ce désamour entre les habitants des principales puissances de l’UE et les institutions européennes sont contredits par les enquêtes d’opinion récentes. En effet, une enquête de l’IFOP, réalisée du 28 juin au 6 juillet 2016 pour la Fondation Jean-Jaurès et la Fondation européenne d’études progressistes (sondage dans six pays, sur des échantillons de 1 000 personnes ou plus représentatifs de la population), démontre le contraire.

Il en ressort en effet que les Italiens, les Français et les Allemands sont, dans leur majorité, favorables à l’UE. Les Italiens sondés ont estimé à 59% qu’appartenir à l’UE était « plutôt une bonne chose » ; 41% seulement y voyaient « plutôt une mauvaise chose ». Chez les Français, l’écart est encore plus grand, avec 67% des sondés qui estiment qu’appartenir à l’UE est « plutôt une bonne chose »… Un taux qui monte même à 81% chez les Allemands.

Enfin, tous se prononcent contre une sortie de l’UE. Si un référendum était organisé, 52% des Italiens sondés disent qu’ils voteraient en faveur du maintien dans l’UE. Ce taux s’élève à 53% chez les Français sondés et à 65% pour les Allemands.

 

 

Cette enquête d’opinion est intervenue quelques jours après le vote du Brexit. Pour mémoire, le 23 juin, les Britanniques, eux, votaient majoritairement en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne : 51,9% ont choisi le « leave » et seulement 48,1% le « remain ». L’étude Ifop montre d’ailleurs que les Italiens, les Français et les Allemands sont plutôt défavorables à l’organisation d’un référendum dans leur pays sur le maintien ou la sortie de l’UE, à respectivement à 54%, 54%, 59%.

L’euroscepticisme existe pourtant bel et bien. C’est ce qu’avait montré une étude menée par le Pew Research Center deux semaines avant le Brexit. Elle montrait que si Italiens et Allemands étaient plutôt favorables à l’UE (respectivement à 58% et à 50%), les Français, eux, y étaient majoritairement défavorables (à hauteur de 61%)

Il semble donc que le Brexit a provoqué un regain d’enthousiasme en faveur de l’Union européenne, notamment en France, et que l’analyse d’Arnaud Montebourg ne soit pas valable aujourd’hui. On ne peut donc pas dire que les Italiens, les Français et les Allemands ne veulent plus de l’Union européenne et, encore moins, que l’UE « risque de disparaître dans les années à venir ».

 

La réponse de l’équipe d’Arnaud Montebourg

Contactée par le FactoScope, qui souhaitait connaître les chiffres sur lesquels se fondait l’ancien ministre, l’équipe d’Arnaud Montebourg évoque un article de Libération et explique que les référendums portant sur l’Union européenne ont majoritairement reçu des réponses négatives. Elle s’appuye également sur le rapport du Pew Research Center précité et rappelle que le « taux d’abstention aux élections européennes n’a jamais été aussi élevé », comme l’évoque un article d’Euractiv.

Certes, ces arguments avancés par l’équipe de d’Arnaud Montebourg montrent bien que les peuples européens contestent parfois le fonctionnement et les décisions de l’Union Européenne ou qu’ils sont mécontents à l’égard de celle-ci. Cependant, ils ne permettent pas d’assurer que les Italiens, les Français et les Allemands ne veulent plus de l’UE et qu’ils voudraient en sortir si on leur en donnait la possibilité. Enfin, ils ne montrent en aucun cas que l’UE est en danger et qu’elle risque de disparaître.

 

Chloé Marriault

Les sources à consulter