BENOIT HAMON

« Au Canada seulement 1% des hommes et 3% des femmes ont arrêté de travailler lorsqu’ils avaient un revenu universel »

 

 

Face à des écoliers âgés de 8 à 12 ans, Benoît Hamon a défendu son projet de revenu universel en affirmant que celui-ci ne freinera pas les chercheurs d’emplois. En donnant l’exemple du Canada, le candidat s’est appuyé sur une expérience du revenu de base menée dans les années 1970, au cours de laquelle seulement 1% des hommes et 3% des femmes ont cessé de travailler. Reste que cette expérience, menée dans deux villes seulement, n’a duré que cinq ans, faute de moyens… et prenait en compte des conditions de ressources.

LE CONTEXTE

Présent dans l’émission Au Tableau , diffusée sur C8, Benoît Hamon a dû expliquer en une minute le principe du revenu universel aux 18 écoliers présents dans une salle de classe. Comme Emmanuel Marcon, Jean-Luc Mélenchon et François Fillon, le candidat socialiste s’est prêté au jeu du maître d’école.

« Vous avez aujourd’hui des gens qui, avec un salaire, n’ont pas de quoi vivre correctement. En France on a des travailleurs pauvres ainsi que des gens qui n’ont pas de travail. Je souhaite que malgré une situation difficile on ait toujours de quoi vivre.» Suite à cette  explication, l’un des écoliers a interpellé le candidat : « Si vous donnez 600 euros tous les mois, je pense que ça va augmenter le chômage, les gens ne verront pas l’intérêt d’aller travailler.»

Benoît Hamon avait une minute pour expliquer aux écoliers ce qu’est le revenu universel.

Pour y répondre, le candidat à la présidentielle a ainsi pris l’exemple de l’étranger. « Quand on a expérimenté le revenu universel ailleurs, on a constaté que ce n’est pas ce qui s’est passé. Au Canada très peu de gens ont arrêté de travailler lorsqu’ils avaient un revenu universel en plus (de leur salaire, NDLR). Seulement 1% des hommes ont arrêté de travailler et seulement 3% des femmes. Cela signifie que le revenu universel n’incite pas à la paresse.»

L’EXPLICATION

Pour souligner l’efficacité du revenu universel Benoît Hamon a donc cité l’exemple du Canada qui, en 1974, a expérimenté pour la première fois le revenu de base inconditionnel et annuel. Cette expérience – ancienne, donc –  a été menée dans les villes de Winnipeg (450 000 habitants) et de Dauphin (environ 10 000 habitants) au Manitoba. Toutefois, ce revenu était conditionnel : seules les familles aux revenus trop bas en bénéficiaient. Ainsi en 1975, les familles avec deux enfants qui percevaient plus de 13 000 dollars par an ne pouvaient pas en bénéficier.

« Le but de l’expérimentation sociale était de savoir si les gens cesseraient de travailler ou travailleraient moins d’heures si on leur garantissait un revenu », affirme la chercheuse Evelyn Forget de l’université de Manitoba, sur le site du mouvement français pour le revenu de base. « Peu de gens à Dauphin ont cessé de travailler, et même parmi ceux qui avaient un emploi à temps plein, très peu ont réduit leur temps de travail.» En 2001, les économistes Derek Hum et Wayne Simpson ont publié un article scientifique qui constate également cette tendance. Comme l’explique Benoît Hamon, 1% des hommes ont cessé leur activité durant cette expérience et 3% des femmes mariées. Néanmoins ce que n’a pas mentionné le candidat socialiste c’est que l’expérience faite au Canada a cessé en 1979, faute de moyens.

Très critiqué sur la question du financement, le revenu universel appliqué à la France, représenterait un coût de 349 milliards d’euros, sur la base de 750 euros versés mensuellement, selon le think tank Institut Montaigne. Depuis, Benoît Hamon a diminué le montant du revenu universel de 150 euros.

Benoît Hamon dit vrai lorsqu’il cite en exemple l’expérience faite au Canada. Il est néanmoins difficile d’en faire un parallèle avec la France. En effet, le contexte économique est différent par rapport aux années 70 et la proposition de Benoît Hamon concernerait tous les Français sans conditions, contrairement au Canada.

Ralitsa Dimitrova