BENOÎT HAMON

« Il y a plus de pauvres en Allemagne qu’en France, mais moins de chômeurs »

 

Benoît Hamon, le candidat du Parti socialiste pour la présidentielle, a affirmé qu’il y a plus de pauvres en Allemagne qu’en France, mais moins de chômeurs. Un constat que confirment les chiffres d’Eurostat et de l’OCDE. En effet, s’il y a moins de personnes sans emploi outre-Rhin, c’est parce que le nombre d’emplois précaires y est plus élevé.

LE CONTEXTE

Le candidat du PS était l’invité de l’émission « C à vous » sur France 5, le 14 février, afin de défendre son programme pour la présidentielle. Il a évoqué les politiques qui parient sur la flexibilité du marché du travail et qui, d’après lui, « ont comme conséquence d’augmenter le nombre de travailleurs pauvres et de baisser le chômage ». Il prend l’exemple de l’Allemagne, en citant les chiffres du taux de chômage (entre 5 et 6 %) et du taux de pauvreté (entre 16 et 17 %). Benoît Hamon en conclut « qu’il y a plus de pauvres en Allemagne qu’en France, mais moins de chômeurs ».

 

L’EXPLICATION

Le taux de pauvreté correspond à la part des personnes ayant un revenu inférieur au seuil de pauvreté, fixé à 60 % du revenu disponible médian. D’après Eurostat, ce seuil correspond à 950 € par mois en Allemagne et à 935 € en France.

En 2015, 16,7 % de la population allemande vivaient en dessous du seuil de pauvreté contre 13,6 % des Français, d’après les statistiques d’Eurostat. Ce même organisme estimait en 2011 à 8,7 millions le nombre de Français vivant en dessous du seuil de pauvreté, contre 13 millions d’Allemands. Benoît Hamon a donc raison lorsqu’il affirme qu’il y a plus de pauvres en Allemagne qu’en France.

Comme le montre le schéma suivant, les taux de pauvreté allemand et français, qui étaient égaux en 1995, ont évolué différemment : ce taux a augmenté en Allemagne alors qu’en France il a diminué.

Cette augmentation fait suite à une réforme du marché du travail et des retraites engagée dans les années 2000 par le prédécesseur d’Angela Merkel, Gerhard Schröder. Les mini jobs se sont développés en Allemagne, tout comme le recours massif au travail à temps partiel.

Un taux de chômage supérieur en France

Le candidat PS pour la présidentielle est également dans le vrai lorsqu’il souligne qu’il y a plus de chômage en France qu’en Allemagne, mais ses chiffres de 5 ou 6 % de taux de chômage sont au-dessus de la réalité. D’après l’OCDE, au cours des trois premiers trimestres de 2016, il y avait entre 4,2 % et 4,3 % de la population active au chômage en Allemagne, contre 9,9 % à 10,1 % en France.

L’Allemagne est actuellement le pays avec le plus faible taux de chômage de l’Union européenne. Le nombre de chômeurs allemands n’a jamais été aussi bas depuis la réunification. Cela s’explique par une réduction du temps de travail et un recours au chômage partiel. La plupart des emplois créés sont des emplois à temps partiel (ils représentent 57 % des emplois créés en 2016 en Allemagne). Ce qui aurait pour conséquence, selon Benoît Hamon, « d’augmenter le nombre de travailleurs pauvres et de baisser le chômage ».

Comme le souligne Benoît Hamon, le taux de chômage est effectivement plus important en France qu’en Allemagne, mais c’est l’inverse en ce qui concerne le taux de pauvreté. Il y a donc bien « plus de pauvres en Allemagne qu’en France, mais moins de chômeurs ».

Jeanne Laudren