EMMANUEL MACRON

« La formation professionnelle ne bénéficie pas aux chômeurs »

Selon Emmanuel Macron, en France, les chômeurs profiteraient beaucoup moins de la formation professionnelle continue que les actifs. Une déclaration vraie puisque seulement un chômeur sur 10 aurait eu accès à une formation en 2015.

LE CONTEXTE

En meeting à Clermont-Ferrand le 7 janvier 2017, Emmanuel Macron a laissé entendre qu’en France, « la formation professionnelle ne forme pas les chômeurs. Avec un budget de 35 milliards d’euros par an, elle profite surtout aux actifs occupés et aux fonctionnaires, donc à ceux qui en ont le moins besoin », dénonçait-il.

L’EXPLICATION

Aujourd’hui, 32 milliards d’euros sont attribués à la formation professionnelle continue en France, presque autant que ce qu’a déclaré Emmanuel Macron. Mais sur ces 32 milliards d’euros, seulement 14% (4,3 milliards d’euros) bénéficient aux demandeurs d’emplois. Sur le fond du problème, Emmanuel Macron a donc raison d’affirmer que les chômeurs sont très peu à bénéficier de la formation professionnelle par rapport aux actifs qui occupent déjà un emploi. Une situation qui commence cependant à s’améliorer grâce aux nombreux dispositifs déployés.

En effet, en 2016, un plan « objectif 500 000 formations », souhaité par le Gouvernement, a été mis en place et semble porter ses fruits. Selon les derniers chiffres de Pôle emploi, plus de 550 000 demandeurs d’emplois sont entrés en formation entre janvier et septembre 2016, contre un peu plus de 380 000 à la même période l’année précédente.

Ces résultats, meilleurs que ceux des années précédentes, sont notamment le fruit de la réforme de la formation professionnelle qui était un des objectifs de François Hollande. « Le financement de la formation sera concentré sur les publics les plus fragiles, les moins formés et les chômeurs », déclarait-il dans son programme de 2012. La formation professionnelle, jusqu’alors encadrée par une loi des années 70, pensée uniquement pour les salariés, a donc été réformée en 2014. La nouvelle loi, entrée en vigueur le 1er janvier 2015, a amené la création d’un compte personnel de formation. Consultable en ligne, il permet aux salariés et aux demandeurs d’emplois de connaître chaque année le nombre d’heures de formation dont ils peuvent bénéficier.

La situation avant la réforme

En 2012, l’Insee et la Dares (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques) avaient réalisé une série d’études mettant en évidence les difficultés d’accès des demandeurs d’emplois à la formation professionnelle. À l’époque, plus d’un chômeur sur deux avait fait les démarches pour suivre une formation sans voir sa demande aboutir. Les actifs occupés, eux, n’étaient que 37 ­% dans cette situation, révélait une étude de l’Insee : Les défis des demandeurs d’emploi face à la formation professionnelle. Les chômeurs qui n’avaient pu avoir accès à une formation, donnaient comme raisons principales « une formation trop chère » et « un manque de soutien du service public de l’emploi ».

Pourtant malgré la réforme, la formation professionnelle ne concerne encore qu’une minorité de chômeurs. En 2012, le taux de demandeurs d’emploi ayant eu accès à une formation était de 10,3 %, selon les chiffres de Pôle Emploi. Soit 473 400 personnes sur 4,6 millions de chômeurs des catégories A, B, C et D*.

En 2015, donc après la réforme, ce sont, selon les chiffres de Pôle emploi, 569 000 demandeurs d’emploi des catégories A, B, C et D qui sont entrés en formation, ce qui représente presque 100 000 formations de plus qu’en 2012. Cependant, si l’on rapporte ce chiffre aux 5,7 millions de chômeurs de l’année 2015, le taux d’entrées en formation, lui, n’a pas bougé puisqu’il s’élève à 10 %, comme en 2012.

Avec un chômeur sur 10 ayant eu accès à une formation en 2015, Emmanuel Macron a donc raison d’affirmer que les chômeurs ne bénéficient pas, ou presque, de la formation professionnelle.

Mathilde Delacroix

* Catégorie A : demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, sans emploi. Catégorie B : demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, ayant exercé une activité réduite courte. Catégorie C : demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, ayant exercé une activité réduite longue. Catégorie D : demandeurs d’emploi non tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi (en raison d’un stage, d’une formation, d’une maladie…).