France
A quelques jours du second tour de l’élection présidentielle, les affaires sont revenues pleinement dans la campagne. Selon une note publiée par le site Mediapart samedi 28 avril, qui l’attribue à Moussa Koussa, ancien chef des services de renseignements extérieurs libyens, Mouammar Kadhafi aurait accepté en 2006 de financer à hauteur de 50 millions d’euros la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007. Aucune trace de ces 50 millions n’a toutefois été retrouvée, à ce jour, dans les comptes de campagne du candidat de l’UMP.
Nicolas Sarkozy a déposé lundi 30 avril une plainte contre Mediapart, qualifié d’“officine de gauche”, pour “faux”, “usage de faux”, “recel de faux” et “publications de fausses nouvelles”. Le parquet de Paris a aussitôt ouvert une enquête sur les accusations de Mediapart. Le site a répliqué mercredi en portant plainte à son tour pour “dénonciation calomnieuse”.
Le même jour, Mustapha Abdeljalil, chef du Conseil national de transition (CNT) libyen, a affirmé que la note de Mediapart semblait “fausse et fabriquée”. Jeudi, nouveau rebondissement : l'ancien chef du gouvernement libyen, Baghdadi Ali Al-Mahmoudi, actuellement détenu en Tunisie confirme dans un entretien à Mediapart “qu'il existe bien un document signé par Moussa Koussa et qu'un financement a bien été reçu par M. Sarkozy”.
Selon Mediapart, le destinataire de cette note était un ancien président d'un fonds d'investissement libyen en Afrique, Bachir Saleh, un ancien proche de Mouammar Kadhafi. Le site d’information affirme que ce dernier, vivant actuellement en France, est recherché par Interpol “sous un autre nom” (voir sa fiche de recherche), ce que réfute Bachir Saleh. Nicolas Sarkozy a affirmé mercredi qu’il serait arrêté s’il était effectivement recherché par Interpol.
Nicolas Sarkozy n’a en revanche pas réagi à l’information révélée par Les Inrocks, selon qui la libération des infirmières bulgares aurait été obtenue en l’échange de la fourniture de nucléaire civil à la Libye. Et ce alors que le président-candidat a récemment nié qu’il n’avait jamais été question de nucléaire avec Mouammar Kadhafi.
Selon l’UMP, ces diverses révélations, intervenant au milieu de l’entre-deux-tours, n’ont eu pour but que de masquer la nouvelle polémique autour de Dominique Strauss-Kahn. L’ancien directeur général du FMI était l’invité “surprise” de l’anniversaire du député de l’Essonne, Julien Dray, samedi 28 avril, où étaient également présents Pierre Moscovici (directeur de la campagne de François Hollande), Manuel Valls (directeur de la communication du candidat socialiste) et Ségolène Royal. Le tout dans un restaurant parisien nommé “J’ose” dont les plats s’appellent “préliminaires”, “passage à l’acte” ou encore “orgasme”… François Hollande, qui n’était pas présent, se serait montré furieux, en privé, de cette initiative.
“DSK” a pourtant déjà assez à faire avec ses affaires, dont celle de l’hôtel Carlton de Lille, dans laquelle les juges d’instruction ont demandé au parquet de pouvoir enquêter sur des soupçons de viols, ont révélé La Voix du Nord et Libération jeudi 3 mai. Dès vendredi, les avocats de Dominique Strauss-Kahn ont fait savoir que ce dernier contestait ces accusations.
Outre le Carlton, la procédure civile qui l’oppose à New York à Nafissatou Diallo pour “agression sexuelle” se poursuit, et ce d’autant plus après le rejet par le juge, mardi 1er mai, de sa demande d’immunité diplomatique. Un procès aura donc bien lieu entre les deux protagonistes.
Mais en France, l’actualité du 1er mai était évidemment politique et occupée par trois grands rassemblements :
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Ceux des syndicats et de la gauche, d’abord, dans tout le pays : entre 316 000 (selon le ministère de l'intérieur) et 750 000 personnes (selon les organisateurs), dont 48 000 à 250 000 à Paris, ont manifesté pour la les traditionnels défilés de la fête du travail, largement ciblés contre Nicolas Sarkozy.
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Le président-candidat réunissait parallèlement ses partisans (200 000 officiellement, un chiffre probablement surévalué) sur la place du Trocadéro, dans le XVIe arrondissement de Paris, pour célébrer la “vraie” fête du travail et glorifier “le drapeau tricolore” face aux “drapeaux rouges de la CGT”.
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Un peu plus tôt dans la journée, le Front national avait lui organisé son traditionnel rassemblement célébrant Jeanne d’Arc sur la place de l’Opéra, à Paris. Comme attendu, Marine Le Pen a annoncé qu’elle votera blanc au second tour de l’élection présidentielle, se projetant déjà dans les élections législatives avec un “rassemblement bleu marine”.
Au lendemain de cette journée se déroulait le très attendu débat d’entre-deux-tours entre François Hollande et Nicolas Sarkozy. Pendant près de trois heures, les deux candidats se sont rendus coups pour coups avec un ton très vif sur des sujets techniques, faisant appel à de nombreux chiffres… et à bon nombre d’approximations. Au final, la plupart des observateurs ont donné un léger avantage à François Hollande, jugé plus convaincant selon un sondage publié jeudi 3 mai.
L’histoire retiendra probablement de ce débat l’anaphore de François Hollande, qui a répété à 16 reprises “Moi président de la République” en débuts de phrases pour fustiger le style de la présidence de Nicolas Sarkozy. Une tirade qui a immédiatement été reprise en musique sur Internet et qui a agacé l’UMP.
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Revoir le débat en intégralité sur TF1.fr
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Lire le compte rendu intégral du débat sur LeMonde.fr
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Lire le décryptage du débat dans cet article et dans cet autre sur LeMonde.fr
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Voir les détournements des images du débat sur Tumblr.com
Il a attendu de voir ce débat avant de choisir : alors que tout le monde s’attendait à un “non choix”, François Bayrou (arrivé cinquième au premier tour avec 9,1% des voix) a annoncé jeudi 3 mai qu’il ne donnait “pas de consigne de vote” à ses électeurs mais qu’il votera “à titre personnel” pour François Hollande, dénonçant la “course poursuite avec l’extrême droite” de Nicolas Sarkozy.
Cette décision, qu’il n’avait pas faite en 2007, lui a attiré les foudres de la droite, le président-candidat dénonçant le manque de “cohérence” du président du MoDem, tandis que le PS a salué ce “coup de grâce” pour l’UMP.
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Lire “François Bayrou, récit d’une rupture historique” sur LeMonde.fr
Tous les partis politiques se sont en revanche réunis pour déplorer l’abrogation avec effet immédiate de la loi punissant le harcèlement sexuel, vendredi 4 mai par le Conseil constitutionnel. La définition (“Le fait de harceler autrui dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle”) de ce délit, qui existait depuis 1992 dans le Code pénal (voir l’article en question), a été jugée trop floue par les Sages, qui statuaient sur une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Cette décision a suscité un tollé, partis politiques et associations appelant à une nouvelle loi au plus vite pour combler le “vide juridique” actuel.
La sécurité des centrales nucléaires françaises a de nouveau été mise en doute, cette semaine, par deux actions indépendantes l’une de l’autre, mercredi 2 mai. Un militant de Greenpeace a pu survoler en parapente et jeter des fumigènes sur la centrale du Bugey, dans l’Ain. Une action filmée par l’organisation écologiste :
Greenpeace a également révélé avoir survolé le site nucléaire de La Hague, dans la Manche, en novembre.
Le même jour, le “poète escaladeur” Hervé Couasnon a pu s’introduire dans la centrale de Civaux (Vienne) après avoir “déjoué la surveillance des vigiles d’entrée” en profitant du passage d’un camion de livraison… Après ces intrusions, le gouvernement a assuré que “les plans de sécurité ont été efficaces”.
Monde
La situation est toujours très tendue en Syrie, où les attaques et bombardements meurtriers continuent : au moins 27 morts lundi, 31 mardi, au moins 4 étudiants tués sur le campus d’Alep jeudi… Au total, plus de 11 100 personnes ont été tuées depuis le début du soulèvement, en mars 2011, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Les opposants répliquent eux aussi : au moins 21 soldats ont été tués dans des combats mercredi 2 mai.
La mission de l’ONU, elle, a une tâche immense devant elle : faire appliquer le plan de paix prôné par Kofi Annan et théoriquement accepté par Damas. Le chef de la mission, le général norvégien Robert Mood, est arrivé dans le pays dimanche et a rapidement appelé l’armée syrienne à faire le premier pas vers l’accalmie. Pour compliquer un peu plus la situation, le régime syrien a refusé des visas à trois observateurs internationaux.
Deuxième pays à réussir sa révolution pendant le “printemps arabe”, l’Egypte a connu une nouvelle flambée de violences, mercredi 2 mai, avec des affrontements au Caire entre opposants au pouvoir et des assaillants non identifiés. Quelque 20 personnes ont été tuées dans ces combats tandis que l'armée égyptienne s'est déclarée prête à quitter le pouvoir dès le 24 mai en cas de victoire d'un des candidats à la présidentielle dès le premier tour.
Le Nigeria, lui, est malheureusement coutumier des semaines meurtrières. Dimanche 29 avril, au moins 20 chrétiens ont été tués dans des attaques d’églises dans le nord du pays. Lundi, c’est dans l’est qu’un kamikaze a lancé sa moto sur un convoi de policiers, tuant 11 personnes. Puis jeudi, c’est sur un marché de bétail dans le nord-est que des explosifs ont tué entre 34 et 56 personnes, selon les bilans.
Les Etats-Unis et la Chine ont connu une crise diplomatique autour du sort du dissident chinois Chen Guangcheng. Ce dernier s’est enfui de sa résidence surveillée le 22 avril et s’est réfugié… dans l’ambassade américaine, où il est resté six jours. Il a un temps annoncé qu’il préférait rester en Chine et que les Etats-Unis l’avaient assuré de leur protection. Mais après son admission dans un hôpital local, il a affirme s’être “retrouvé tout seul”, être “très déçu par les Américains” et vouloir rejoindre les Etats-Unis. Après plusieurs jours d’incertitude et de vives critiques de la part des républicains contre l’administration américaine, la Chine a accepté de remettre à Chen Guangcheng des “documents de voyage”.
Les républicains, justement, connaissent avec certitude leur candidat face à Barack Obama lors de l’élection présidentielle américaine en novembre. Mitt Romney n’a désormais plus qu’un seul adversaire, Ron Paul, après le retrait de Newt Gingrich de la primaire républicaine.
Un an après la mort d’Oussama Ben Laden, Barack Obama a lui effectué une visite surprise en Afghanistan, mardi 1er mai, pour signer un accord prévoyant un partenariat entre le pays et les Etats-Unis pendant dix ans après le retrait des troupes américaines. Un accord condamné par les talibans, qui ont promis une vague d’attaques contre l’Otan, dont la première a eu lieu à Kaboul mercredi, causant la mort de 7 personnes.
Il n’y a pas qu’en Afghanistan que des attaques meurtrières ont eu lieu cette semaine : au moins 20 personnes, dont cinq policiers, ont été tuées et une cinquantaine d'autres blessées vendredi 4 mai par la bombe d'un kamikaze à un poste de contrôle de la police dans le nord-ouest du Pakistan.
Attaque également dans le Caucase russe, où un double attentat à la voiture piégée a tué 14 personnes et blessé 120 autres, jeudi 3 mai dans la province du Daguestan. Une enquête pour “terrorisme” a été ouverte.
EN BREF
En France…
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Adlène Hicheur, un chercheur franco-algérien de 35 ans, a été condamné à cinq ans de prison, dont un avec sursis, par le tribunal correctionnel de Paris, vendredi 4 mai, pour avoir évoqué dans des mails des projets d'attentats en France.
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Un ancien collaborateur de Nicolas Sarkozy quand celui-ci était ministre du budget (1993-1995), Thierry Gaubert, a été condamné jeudi 3 mai à dix mois de prison avec sursis et 10 000 euros d'amende par le tribunal de grande instance de Nanterre. Il a été reconnu coupable d’“abus de biens sociaux” et “abus de confiance” dans une affaire de détournement de fonds dans les 1990.
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L’inventeur français Roland Moreno est mort dimanche 29 avril à l’âge de 66 ans d’une embolie pulmonaire. Il était notamment connu pour avoir créé en 1974 la carte à puce, aujourd’hui largement utilisée (cartes bancaires, cartes SIM, cartes Vitale, etc.).
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Le chanteur et auteur-compositeur français Eric Charden (de son vrai nom Jacques Puissant) est mort dimanche 29 avril à l'âge de 69 ans d'un cancer des ganglions. Il était notamment connu pour son duo (“Stone et Charden”) avec la chanteuse Annie Gautrat.
Dans le monde…
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Un correspondant français de France 24, Roméo Langlois, a été capturé par les Farc, samedi 28 avril, dans l’attaque d’un groupe de militaires dans le sud de la Colombie. L’armée colombienne a exclu toute intervention pour le libérer et a suspendu ses opérations aériennes dans la région.
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Le procureur du Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL) a requis jeudi 3 mai une peine de quatre-vingts ans contre Charles Taylor. L'ancien président du Liberia a été reconnu coupable, le 26 avril, de “crimes contre l'humanité” et “crimes de guerre” commis en Sierra Leone entre 1996 et 2002.
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Alors des combats opposent le Soudan et le Soudan du Sud à leur frontière commune, le Conseil de sécurité a adopté mercredi 2 mai une résolution exigeant des deux Etats l’arrêt des hostilités sous quarante-huit heures. Mais dès le lendemain, le Soudan du Sud dénonçait de nouveaux bombardements de la part de son voisin du nord.
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Au moins 105 personnes sont mortes et 100 autres portées disparues dans le naufrage d’un ferry sur un fleuve d’Inde, lundi 30 avril.
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Au moins 21 personnes, dont 18 membres d'Al-Qaida et un officier de l'armée, ont été tuées lundi 30 avril dans de violents combats dans le sud du Yémen.
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Une des quatre versions du Cri du peintre norvégien Edvard Munch a été vendu aux enchères, mercredi 2 mai, pour 119,92 millions de dollars à un collectionneur. L’oeuvre est ainsi devenue la plus chère jamais vendue aux enchères.
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Le chanteur américain Adam Yauch, alias MCA du groupe de hip hop Beastie Boys, est mort vendredi 4 mai à l’âge de 47 ans des suites d’un cancer. Le groupe s’était fait connaître dans les années 1980 avec des tubes comme Sabotage ou Intergalactic.
Dans les sports…
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L’Olympique lyonnais a remporté la Coupe de France de football, samedi 28 avril, en battant les amateurs de l’US Quevilly avec la plus petite marge (1-0, voir le résumé en vidéo). Les Lyonnais ont ainsi remporté leur premier trophée depuis quatre ans.
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Vingt ans, presque jour pour jour, après la catastrophe de Furiani (18 morts, 2 000 blessés le 5 mai 1992), le club de football de Bastia est devenu champion de Ligue 2, samedi 28 avril, en battant Metz (3-0), et retrouvera le plus haut niveau national sept ans après sa relégation.
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